Dimanche 26/03/2023
Boubacar Traoré
Boubacar Traoré est le dernier bluesman malien de sa génération. Depuis le décès d'Ali Farka Touré, il demeure l'unique représentant de ce style musical en Afrique de l'Ouest. Après une vie tourmentée qui l'a vu passer du statut de première star de l'indépendance, au début des années 60, puis disparaître de la vie musicale pendant près de 20 ans, avant de revenir sur le devant de la scène au mitan des années 80, Karkar est toujours là.
Dans les années 60, les Maliens se réveillaient chaque matin au son de sa voix mélancolique à la radio qui chantait l'indépendance. Natif de Kayes, ce guitariste bluesman est un artiste adulé, voire vénéré.
Guitariste, chanteur, songwriter, Boubacar Traoré possède un style inimitable et complètement personnel. Autodidacte, inspiré par la tradition kassonké - il est né à Kayes au nord-ouest du Mali en 1942 - il a, comme tous les jeunes de sa génération, découvert à la radio le blues, le rock, le jazz, la soul, les musiques cubaines et congolaises. Il s'est forgé un univers musical qui ne ressemble à aucun autre. Poétique, fluide, dépouillé son jeu de guitare est au service de mélodies mélancoliques inspirées par la vie quotidienne, l'amour heureux ou malheureux, le temps qui passe... Sa voix chargée d'émotion, au timbre chaud et grave n'a pas été altérée par les années. On le compare souvent à Skip James, Robert Johnson, aux bluesmen du delta du Mississipi. Mais c'est sur les rives du Niger, à Bamako où il demeure désormais, qu'il puise son inspiration.
Boubacar Traoré porte en lui toutes les beautés du blues africain. Parmi les trésors de la musique mandingue, ce diamant possède l'éclat noir d'une exceptionnelle pureté. Aucune autre voix que celle de "Kar Kar" - celui qui sait dribbler, surnom donné par ses amis, amateurs comme lui de football - ne mêle avec une authenticité aussi émouvante les limons du fleuve Niger à ceux du Mississipi. Son jeu de guitare autodidacte, unique, inimitable, doit beaucoup à la kora dont il s'est inspiré. Mais on y trouve des couleurs et un phrasé qui rappellent ceux des grands bluesmen noirs américains du Sud profond : Blind Willie McTell, Robert Johnson, Muddy Waters...
A 20 ans, dans les années 60 marquées par l'euphorie des Indépendances, Boubacar Traoré était le Chuck Berry, l'Elvis Presley malien. Le premier, bien avant son cadet Ali Farka Touré, à jouer une musique d'inspiration mandingue avec une guitare électrique. A cette époque, les maliens se réveillaient au son de la voix mélancolique et de la guitare saturée de Boubacar. Des tubes comme "Mali Twist" (« Enfants du Mali indépendant prenons-nous en charge / Que tous les jeunes reviennent au pays / Ensemble édifions la patrie »), et "Kayeba" ont fait danser une génération qui découvrait la liberté. Passé la fête et l'illusion lyrique, le 19 novembre 1968 un vent aigre s'abat sur le Mali; le régime socialiste de Modibo Keita est balayé par un coup d'Etat militaire. Kar Kar et ses chansons disparaissent des ondes. Revenu sans un sou dans sa ville natale, Kayes en pays Kassonké au nord-ouest de Bamako près de la frontière avec le Sénégal, Boubacar devient travailleur agricole, ouvre une boutique avec son frère aîné - celui qui lui a fait découvrir et offert sa première guitare - travaille pour nourrir sa famille.
Il est redécouvert en 1987 par des journalistes de la télévision nationale de passage à Kayes. « Kar, il faut venir à Bamako. Depuis que la télévision existe, on ne t'a jamais vu. Il faut que tout le monde sache que tu n'es pas mort, que tu vis »... C'est comme une deuxième naissance de l'artiste : « Les gens étaient étonnés de me voir. Pour la plupart, ils ne m'avaient entendu qu'à la radio », déclare-t-il alors. Mais le destin vient briser la renaissance de Kar Kar à la musique. Pierrette, la belle métisse, sa femme, sa muse, son amour meurt en mettant au monde leur dernier enfant. Désespéré, anéanti, Kar Kar redevient une ombre. C'est à ce moment qu'il décide de chercher du travail à Paris où il rejoint les nombreux travailleurs émigrés maliens dont il partage la dure vie. « J'ai fait deux ans de travail dans le bâtiment ». Il ne livrera rien d'autre sur cette expérience, mais dit tout autour d'une chanson : « Tu peux être un roi chez toi, mais dès que tu es un émigré tu es n'importe qui ». De Barbès et du foyer de Montreuil, où il se produit un peu, il garde pour mémoire cette casquette plate qui couronne désormais sa haute silhouette.
C'est à ce moment qu'un producteur anglais le retrouve et lui fait enregistrer son premier album "Mariama" en 1990. Déchirante, dépouillée, mélancolique, la musique de Kar Kar n'est plus celle du jeune homme des années 60. Elle s'est épurée et est devenue l'expression d'un homme mûr qui y exprime ses douleurs et ses joies, toujours avec cette voix au timbre si particulier, nimbée de nostalgie et de poésie. Après ce disque, tout s'emballe. Boubacar Traoré rattrape le temps perdu et conquiert les scènes d'Europe puis des Etats-Unis et du Canada... Et enregistre 6 albums entre 1992 et 2005 : "Sécheresse" (1992), "Les enfants de Pierrette" (1995), "Sa Golo" (1996), "Maciré" (1999),
.Dans son pays Boubacar Traoré est respecté et reconnu, surtout par les jeunes qui redécouvrent l'un des pères fondateurs de la musique moderne mandingue, dont il est un des grands ambassadeurs. Quand il rentre de ses tournées internationales, Kar Kar rejoint la concession qu'il a achetée sur une colline de Bamako où il élève des moutons et cultive un potager dont il est très fier. « Au Mali tout le monde est agriculteur, c'est le plus sûr moyen pour vivre ».
Fidèle à ses racines, c'est la première fois dans l'histoire de la musique de Boubacar Traoré de de produire « 100% malien ». Grace à la collaboration avec Hambe production, engagé pour la conservation et la valorisation du Folk National du Mali, KarKar s'enregistre avec des instrumentistes du terroir qui manient parfaitement Kamelen Goni, Doum doum, calebasse et le Djeli Ngoni.
Il renoue ainsi davantage à la source du blues manding.
Alors qu'il y a 30 ans, il invitait des musiciens du sud des Etats Unis comme Cédric Watson au violon et au washboard, et Corey Harris à la guitare pour changer les couleurs de ses chansons tout en gardant son originalité musicale ; en 2022, il a de nouveau voulu s'ouvrir en invitant des jeunes talentueux Maliens pour un renouveau musical et offrir un album de neuf titres.
Cette nouveauté du blues man, le dernier « The last Malian Racin Twist », est sans nul doute à découvrir.
Boubacar Traore Kar Kar - Guitare / Chant
Daouda Diarra - calebasse et bara / Chant
Abdoulaye Dembélé dit yaro - Kamalen N'Goni, kora, Dozon N'goni, Bolon /Chant
Sissoko - Djéli N'Goni /Chant
Production : New Morning
Boubacar Traoré est le dernier bluesman malien de sa génération. Depuis le décès d'Ali Farka Touré, il demeure l'unique représentant de ce style musical en Afrique de l'Ouest. Après une vie tourmentée qui l'a vu passer du statut de première star de l'indépendance, au début des années 60, puis disparaître de la vie musicale pendant près de 20 ans, avant de revenir sur le devant de la scène au mitan des années 80, Karkar est toujours là.
Dans les années 60, les Maliens se réveillaient chaque matin au son de sa voix mélancolique à la radio qui chantait l'indépendance. Natif de Kayes, ce guitariste bluesman est un artiste adulé, voire vénéré.
Guitariste, chanteur, songwriter, Boubacar Traoré possède un style inimitable et complètement personnel. Autodidacte, inspiré par la tradition kassonké - il est né à Kayes au nord-ouest du Mali en 1942 - il a, comme tous les jeunes de sa génération, découvert à la radio le blues, le rock, le jazz, la soul, les musiques cubaines et congolaises. Il s'est forgé un univers musical qui ne ressemble à aucun autre. Poétique, fluide, dépouillé son jeu de guitare est au service de mélodies mélancoliques inspirées par la vie quotidienne, l'amour heureux ou malheureux, le temps qui passe... Sa voix chargée d'émotion, au timbre chaud et grave n'a pas été altérée par les années. On le compare souvent à Skip James, Robert Johnson, aux bluesmen du delta du Mississipi. Mais c'est sur les rives du Niger, à Bamako où il demeure désormais, qu'il puise son inspiration.
Boubacar Traoré porte en lui toutes les beautés du blues africain. Parmi les trésors de la musique mandingue, ce diamant possède l'éclat noir d'une exceptionnelle pureté. Aucune autre voix que celle de "Kar Kar" - celui qui sait dribbler, surnom donné par ses amis, amateurs comme lui de football - ne mêle avec une authenticité aussi émouvante les limons du fleuve Niger à ceux du Mississipi. Son jeu de guitare autodidacte, unique, inimitable, doit beaucoup à la kora dont il s'est inspiré. Mais on y trouve des couleurs et un phrasé qui rappellent ceux des grands bluesmen noirs américains du Sud profond : Blind Willie McTell, Robert Johnson, Muddy Waters...
A 20 ans, dans les années 60 marquées par l'euphorie des Indépendances, Boubacar Traoré était le Chuck Berry, l'Elvis Presley malien. Le premier, bien avant son cadet Ali Farka Touré, à jouer une musique d'inspiration mandingue avec une guitare électrique. A cette époque, les maliens se réveillaient au son de la voix mélancolique et de la guitare saturée de Boubacar. Des tubes comme "Mali Twist" (« Enfants du Mali indépendant prenons-nous en charge / Que tous les jeunes reviennent au pays / Ensemble édifions la patrie »), et "Kayeba" ont fait danser une génération qui découvrait la liberté. Passé la fête et l'illusion lyrique, le 19 novembre 1968 un vent aigre s'abat sur le Mali; le régime socialiste de Modibo Keita est balayé par un coup d'Etat militaire. Kar Kar et ses chansons disparaissent des ondes. Revenu sans un sou dans sa ville natale, Kayes en pays Kassonké au nord-ouest de Bamako près de la frontière avec le Sénégal, Boubacar devient travailleur agricole, ouvre une boutique avec son frère aîné - celui qui lui a fait découvrir et offert sa première guitare - travaille pour nourrir sa famille.
Il est redécouvert en 1987 par des journalistes de la télévision nationale de passage à Kayes. « Kar, il faut venir à Bamako. Depuis que la télévision existe, on ne t'a jamais vu. Il faut que tout le monde sache que tu n'es pas mort, que tu vis »... C'est comme une deuxième naissance de l'artiste : « Les gens étaient étonnés de me voir. Pour la plupart, ils ne m'avaient entendu qu'à la radio », déclare-t-il alors. Mais le destin vient briser la renaissance de Kar Kar à la musique. Pierrette, la belle métisse, sa femme, sa muse, son amour meurt en mettant au monde leur dernier enfant. Désespéré, anéanti, Kar Kar redevient une ombre. C'est à ce moment qu'il décide de chercher du travail à Paris où il rejoint les nombreux travailleurs émigrés maliens dont il partage la dure vie. « J'ai fait deux ans de travail dans le bâtiment ». Il ne livrera rien d'autre sur cette expérience, mais dit tout autour d'une chanson : « Tu peux être un roi chez toi, mais dès que tu es un émigré tu es n'importe qui ». De Barbès et du foyer de Montreuil, où il se produit un peu, il garde pour mémoire cette casquette plate qui couronne désormais sa haute silhouette.
C'est à ce moment qu'un producteur anglais le retrouve et lui fait enregistrer son premier album "Mariama" en 1990. Déchirante, dépouillée, mélancolique, la musique de Kar Kar n'est plus celle du jeune homme des années 60. Elle s'est épurée et est devenue l'expression d'un homme mûr qui y exprime ses douleurs et ses joies, toujours avec cette voix au timbre si particulier, nimbée de nostalgie et de poésie. Après ce disque, tout s'emballe. Boubacar Traoré rattrape le temps perdu et conquiert les scènes d'Europe puis des Etats-Unis et du Canada... Et enregistre 6 albums entre 1992 et 2005 : "Sécheresse" (1992), "Les enfants de Pierrette" (1995), "Sa Golo" (1996), "Maciré" (1999),
.Dans son pays Boubacar Traoré est respecté et reconnu, surtout par les jeunes qui redécouvrent l'un des pères fondateurs de la musique moderne mandingue, dont il est un des grands ambassadeurs. Quand il rentre de ses tournées internationales, Kar Kar rejoint la concession qu'il a achetée sur une colline de Bamako où il élève des moutons et cultive un potager dont il est très fier. « Au Mali tout le monde est agriculteur, c'est le plus sûr moyen pour vivre ».
Fidèle à ses racines, c'est la première fois dans l'histoire de la musique de Boubacar Traoré de de produire « 100% malien ». Grace à la collaboration avec Hambe production, engagé pour la conservation et la valorisation du Folk National du Mali, KarKar s'enregistre avec des instrumentistes du terroir qui manient parfaitement Kamelen Goni, Doum doum, calebasse et le Djeli Ngoni.
Il renoue ainsi davantage à la source du blues manding.
Alors qu'il y a 30 ans, il invitait des musiciens du sud des Etats Unis comme Cédric Watson au violon et au washboard, et Corey Harris à la guitare pour changer les couleurs de ses chansons tout en gardant son originalité musicale ; en 2022, il a de nouveau voulu s'ouvrir en invitant des jeunes talentueux Maliens pour un renouveau musical et offrir un album de neuf titres.
Cette nouveauté du blues man, le dernier « The last Malian Racin Twist », est sans nul doute à découvrir.
Boubacar Traore Kar Kar - Guitare / Chant
Daouda Diarra - calebasse et bara / Chant
Abdoulaye Dembélé dit yaro - Kamalen N'Goni, kora, Dozon N'goni, Bolon /Chant
Sissoko - Djéli N'Goni /Chant